Time To Tell Chronographs for collectors

La véritable histoire de Perret & Berthoud, manufacture des montres Universal. 1ère partie : l’historique

18 janvier 2024

Perret & Berthoud, manufacture des montres Universal

Par Joël Pynson

« Nous devons arriver à ce que le client exige de son horloger non pas une montre, mais une Universal »

Raoul Perret

Pour nombre de collectionneurs de montres, Universal fait partie des plus belles marques suisses. Des modèles mythiques comme le chronographe Tri-Compax ou la montre automatique Polerouter ont beaucoup fait pour la réputation de l'horlogerie helvétique partout dans le monde.

L'histoire mouvementée de la société est, comme souvent, difficile à reconstituer[1]. Les multiples changements à la tête de l'entreprise, et les nombreux déménagements, expliquent l'absence d'archives fiables, et les informations disponibles sur l'Internet sont assez fantaisistes. Il faut donc se plonger dans les publications professionnelles d'époque pour tenter de reconstituer par petites touches l'histoire de l'entreprise et des hommes qui l'ont bâtie.

  1. Histoire de l'entreprise

1.1 De Descombes & Perret à Bulova

C'est au Locle, le 1er janvier 1894 qu'a commencé l'histoire d'Universal, lorsque Numa-Émile Descombes et Georges-Ulysse Perret ont créé la société Descombes & Perret pour faire commerce d'horlogerie[2].

Emile Descombes et Ulysse Perret se connaissaient bien. Ils avaient travaillé ensemble pour une filiale de Bergeon, le célèbre fournisseur d'outillage pour l'horlogerie, à Livourne, en Italie. Ils y avaient d'ailleurs croisé Louis Berthoud, comptable et originaire de Neuchâtel, qui plus tard jouera un rôle majeur chez Universal[3].

Descombes et Perret voulaient certainement voler de leurs propres ailes et avaient choisi Le Locle, haut lieu de la chronométrie pour s'installer à leur compte.

La marque Universal Watch est déposée en 1894, année de création de l'entreprise. De nombreuses autres marques suivront : Uso Ferrovie, Cronometro Ferroviario, Uso Militari, La Meridiana, Cronometro Maritimo, Edera, Lys, Lepantos, Thermos, Orologio della Ferrovia, Mirus, Urbe, etc. La plupart de ces marques ont une consonance italienne : c'est en effet le marché italien qui est exploré en premier. D'ailleurs, l'épouse d'Émile Descombes est italienne, et c'est à Milan que se trouvait la société Descombes & Cie qui va distribuer les montres Universal, ainsi d'ailleurs que celles de Zenith, les deux entreprises locloises ayant des rapports très étroits.

Peu d'informations sont disponibles sur les premières montres commercialisées par Descombes et Perret. L'entreprise a débuté comme comptoir de vente et assurait la distribution en Italie de montres de plusieurs autres marques, dont certaines faites en leur nom[4]. Mais l'idée de fabrication était déjà là puisque Descombes et Perret ont déposé en 1894 un brevet sur une montre à heure sautante[5], et en 1896 un autre brevet sur une montre genre Roskopf[6].

En 1895, Louis Berthoud entre dans l'entreprise de ses anciens collègues de travail. Mais par un terrible coup du sort, Émile Descombes meurt brutalement en 1897. Georges Perret va alors proposer à Louis Berthoud de s'associer pour créer la société « Perret & Berthoud[7] ». Et ce sont ces deux noms qui seront accolés à la marque Universal pendant plus de 50 ans.

Les montres Perret & Berthoud ont du succès en Italie et leur réputation grandit. À l'Exposition internationale de Milan en 1906 elles obtiennent une médaille d'or[8].

4 ans plus tard, en 1910, Universal ouvre un deuxième marché : l'Espagne. Une filiale est ouverte à Madrid et une nouvelle salve de marques est déposée : Edera, Lys, Lepantos, Thermos, Mirus, Urbe, Ultus, Domo, Universal Watch Extra, etc.

En 1914, Perret & Berthoud obtiennent un bulletin de 1ère classe au Bureau Officiel de Contrôle du Locle[9]. L'entreprise est en effet progressivement devenue un « établisseur », c'est-à-dire une fabrique passant des ordres à des sous-traitants pour fabriquer ses propres montres, et la qualité de leur fabrication est attestée par l'obtention de bulletin de chronomètre.

Publicité de 1916

Vers 1917, à la demande de l'armée italienne, Perret & Berthoud produisent leur premier chronographe-bracelet[10]. Plusieurs autres fabricants avaient déjà ce type de montres dans leur gamme comme Breitling, Omega, Longines ou Nathan Weil. Mais c'est sans doute la solide implantation de Perret & Berthoud en Italie qui a joué en faveur du fabricant du Locle. Il est fort probable que les mouvements de ces chronographes-bracelets aient été fournis par la Martel Watch. Cette manufacture, créée en 1911 au Locle par Georges Pellaton, avait été transférée aux Pont-de-Martel en 1915[11], et elle deviendra par la suite fournisseur attitré des calibres chronographe Universal. Mais on connait aussi des chronographes-bracelets Universal de la même époque munis de calibres Jeanneret-Lémania.

Publicité de 1920

En 1918 Perret & Berthoud disposent d'une gamme complète de montres-bracelets en argent, en platine et en or, certaines portant la marque UW Extra (Universal Watch Extra), et décident l'année d'après de transférer leur siège social à Genève, au 48 rue du Stand[12]. Il s'agissait sans doute d'une volonté de montée en gamme en bénéficiant de la renommée de la ville de Genève. De fait, on va voir très vite apparaître des montres-bracelets de forme variées et richement décorées. Deux and plus tard, en 1921, l'entreprise va s'installer sur la prestigieuse rue du Rhône, au n°43.

Raoul Perret

En 1923, l'entreprise devient une S.A. et un évènement majeur survient : l'arrivée de Raoul Perret, fils de Georges-Ulysse. Raoul Perret est né en 1901. Il est diplômé de l'école de commerce et de l'école d'horlogerie du Locle, et il est l'élève du célèbre horloger James Pellaton. A 19 ans il commence comme commercial de l'entreprise paternelle en Espagne et en Italie, ce qui le formera aux exigences des marchés et aux réalités du terrain. Féru d'art et d'esthétique, il s'intéresse très tôt à la création des modèles de l'entreprise, et c'est lui marquera de son empreinte la manufacture Universal Genève pendant plus de 40 ans.

En 1932, Raoul Perret, qui n'a que 31 ans, devient directeur de Perret & Berthoud. Ce sont des années de crise pour l'horlogerie suisse qui se réorganise en profondeur, avec la création de l'ASUAG et des trusts horlogers comme Ébauches SA, qui, avec l'appui de la Confédération, vont imposer le « statut horloger ». Ce statut impose de faire le choix d'être une manufacture et de produire ses ébauches, ou de se fournir auprès d'Ébauches SA et de ne pas fabriquer ses mouvements. Perret & Berthoud vont courageusement choisir le statut de manufacture, certes plus risqué, mais laissant plus de liberté dans la création de mouvements. Pour cela, mieux vaut compter sur d'autres manufactures, car le transfert entre manufactures est autorisé. Dès 1934, Raoul Perret entre au conseil d'administration de la célèbre manufacture Zenith du Locle[13], tout en s'assurant les services de la manufacture Martel Watch pour ses calibres chronographe.

Publicité Zenith, 1935

Georges Perret décède en 1933. Raoul Perret va dès lors pouvoir mettre en place sa stratégie pour faire de Perret & Berthoud et d'Universal une marque au firmament de l'horlogerie suisse : la spécialisation dans le chronographe et la montre de style « qualité Genève », et l'exploration de nouveaux marchés, en Europe et aux Amériques.

Publicité de 1935

La marque Compur est déposée en 1934, et l'année d'après tout une gamme de chronographes est lancée, fièrement exposée à la Foire de Bâle 1935. Ils sont tous à deux poussoirs et ce sont parmi les premiers, avec ceux de Breitling et d'Angélus, à disposer de cette amélioration. Toutes le boîtes sont qualitatives : or ou acier, alors que l'acier inoxydable, très onéreux à cette époque, n'a été introduit en horlogerie en Suisse que quelques années auparavant. C'est désormais la marque Universal Watch Genève qui apparait le plus souvent sur les cadrans, même si le nom officiel de l'entreprise est toujours Perret & Berthoud.

L'entreprise commence à explorer d'autres marchés. Dès 1936 Universal est représentée en France, en Allemagne et au Royaume Uni. Elle se dote d'autre part d'un service publicité efficace : des annonces vont désormais apparaître régulièrement dans la presse professionnelle suisse et dans la presse grand public en Europe.

En 1940, l'entreprise devient Manufacture des montres Universal, Perret & Berthoud SA, affirmant ainsi son statut de manufacture et confortant l'utilisation de la marque Universal. La gamme des calibres Universal s'est considérablement étoffée : plus d'une douzaine pour les montres-bracelets, depuis le petit calibre carré de 5 lignes (11,50 x 16,00 mm) jusqu'au calibre rond de 12 lignes (23,30 mm).

Planche de calibres Universal, 1939

La même année, René Perret, frère de Raoul, entre dans l'entreprise. Les installations de Genève, rue du Rhône, sont agrandies et occupent désormais 2 étages de l'immeuble[14].

                    Ateliers Universal, 1940

La deuxième Guerre Mondiale eut peu d'effet sur l'horlogerie suisse. Le nombre de pièces exportées a même augmenté et le chiffre d'affaires plus que doublé entre 1939 et 1945, malgré les pénuries de matières premières et les difficultés d'approvisionnement. Ceci explique sans doute l'optimisme des dirigeants d'Universal qui font construire une nouvelle usine aux Ponts-de-Martel en 1941 où seront fabriqués les chronographes et les pièces compliquées (montres non chronographe avec calendrier)[15].

Fabrique Universal aux Ponts-de-Martel, 1941

Construite en 5 mois et demi, elle abrite un outillage moderne et produit en particulier le chronographe Aero-Compax, ainsi qu'un chronographe totalisateur pour avions. Pendant la guerre, les fabricants suisses étaient en effet très sollicités pour fabriquer du matériel militaire. L'année d'après Georges Pellaton qui dirige la Martel-Watch décède. Raoul Perret va alors prendre la direction de l'entreprise et s'assurer ainsi l'exclusivité des mouvements[16]. La même année, il quitte le conseil d'administration de Zenith[17].

C'est aussi pendant la deuxième Guerre Mondiale qu'Universal va s'installer sur le marché américain en créant l'Universal Geneva Watch Co. à New York. L'arrivée de l'entreprise sur le marché le plus important pour l'horlogerie suisse, va lui donner une véritable dimension internationale.

Publicités de 1948

En 1945, Louis-Edouard Berthoud quitte la société. Il décèdera deux ans plus tard. Ce sont désormais les frères Perret qui gèrent l'entreprise, avec un dynamisme encore accru : dès 1948 apparaissent les premières montres automatiques de manufacture[18] (calibre 138 très classique avec masse oscillante à butées), les premières montres calendrier, et de superbes montres avec cadran en émail cloisonné.

Façade de l'immeuble Universal à Genève, 1949

Ateliers Universal à Genève, 1949

En 1949 l'immeuble de Genève est entièrement modernisé[19]. La lumière est désormais partout, et les combles sont réaménagés pour accueillir les ateliers, qui ainsi bénéficient de la lumière du jour. C'est aussi l'année du lancement du modèle Monodate, montre avec date par guichet à 3h00, design typique de la belle montre suisse des années 1950. La version automatique de la Monodate sera lancée en 1951.

Publicité de 1950

Entre 1951 et 1955, la structure sociale d'Universal va progressivement se modifier. D'abord par la création de la Société de vente des montres Universal SA (1951), puis par la création de Perret Frères (1953) qui récupère plusieurs brevets de Perret & Berthoud, et enfin en 1955 la modification de la manufacture des montres Universal, Perret & Berthoud, qui devient Montres Universal, Perret & Berthoud SA, société dédiée à la commercialisation des montres Universal ; et enfin la transformation de Perret Frères en Manufacture des montres Universal, Perret Frères, qui assure la fabrication et la vente.

Publicité de 1955

Le célèbre modèle Polerouter, dont il sera question plus loin, est lancé en 1955, et l'année d'après Universal inaugure une nouvelle usine à Carouge, près de Genève[20]. C'est un superbe bâtiment, œuvre de l'architecte Davoine, à qui l'on doit d'autres fabriques d'horlogerie en Suisse, dont 60% des façades sont en verre. Le parc des machines repose sur une dalle de béton ancrée dans le sol pour éviter les vibrations. Les salles dédiées aux contrôles sont climatisées et insonorisées. L'horloge mère est pilotée par une horloge à quartz et répartit l'heure exacte dans tous les ateliers.

Les bâtiments Universal à Carouge en 1966

Toujours en 1956, Raoul Perret quitte la Martel Watch, remplacé en tant que président par Raoul Pellaton. C'est un tournant pour Universal car le chronographe va progressivement être détrôné dans l'entreprise par les montres automatiques et les montres-bijoux. Le chronographe devient d'ailleurs moins recherché sur les marchés internationaux et Universal suit là une tendance assez générale. Mis en difficulté par le départ d'Universal, Martel Watch sera rachetée par Zenith en 1960.

Publicité de 1958

Le 27 mai 1955 Universal a breveté un mouvement automatique révolutionnaire : le rotor ne coiffe pas le mouvement mais est intégré à l'intérieur du mouvement, permettant ainsi la réalisation de calibres extrêmement mince. Mais Universal n'était pas la seule manufacture à s'intéresse à ces « rotors planétaires » ou « micro-rotors ». Hans Kocher, directeur technique de la manufacture Büren, avait déposé le 21 juin 1954 un brevet à ce sujet et avait donc l'antériorité. Universal accepta de payer à Büren une redevance de 4- Francs suisses par montre[21].

Mais cela permit aussi bien à Büren qu'à Universal de lancer en 1958 les montres automatiques les plus plates jamais réalisées : le mouvement de la Buren Super Slender ne faisait que 4,2 mm d'épaisseur, et celui de l'Universal Microtor 4,1 mm, soit le plus plat du monde à cette époque. En 1959, Universal et Piaget co-signeront un brevet sur un nouveau calibre automatique avec micro-rotor encore plus mince, ce qui permettra à Piaget, moyennant le paiement d'une redevance à Büren, de lancer sur le marché la montre automatique la plus plate du monde : le calibre ne faisait que 2,3 mm d'épaisseur.

1959 est aussi en Europe la date de naissance du marché commun, auquel la Suisse n'adhère pas. Pour profiter malgré tout des opportunités commerciales existantes, Universal s'associe à la société française LIP pour la distribution de ses montres en France et en Belgique[22]. À cette occasion Universal acquiert une participation au capital de Lip. Cette collaboration se prolongera en 1964, Lip fournissant des calibres électriques à Universal.

En 1960, Universal et Movado décident de collaborer[23]. Cela permettra un échange de calibres, Movado pouvant par exemple utiliser des micro-rotors, mais l'effort commun concerne surtout l'électronique. Les premières montres électrique d'Hamilton et Lip sont en effet déjà sur le marché et une spécialisation s'impose dans ce domaine totalement nouveau pour les horlogers. Un centre de recherche, baptisé Moversal, est mis en place. Il sera par exemple à l'origine d'un compteur à impulsions présenté en 1963 au Salon de l'Électronique Industrielle[24] à Bâle. Le rachat d'Universal par Bulova en 1966 mettra fin à cette association.

Avec la libération progressive du statut horloger au début des années 1960, les fabricants suisses sont soumis à une concurrence accrue, et les sociétés étrangères peuvent désormais racheter des fabricants suisses. C'est aussi le temps des concentrations : les fabricants suisses se regroupent pour mettre en commun leurs départements de recherche ou leurs sites de production.

En 1966, l'ASUAG crée Chronos Holding avec pour objectif de faciliter la concentration des fabriques de montres[25]. Cet objectif sera rapidement atteint avec le rachat de Cyma, Ernest Borel et Doxa, qui sont réunies sous la holding Synchron SA. Universal rejoint Chronos Holding le 25 avril 1966, mais, à la surprise générale, communique le 29 août qu'Universal a intégré le groupe américain Bulova Watch Co[26].

Publicité de 1965

Pour Bulova c'est une excellente affaire : Universal est présente sur des marchés latins où Bulova n'est pas représentée, et Universal possède de remarquables calibres automatiques permettant de faire des montres minces et élégantes. C'est aussi une réponse à Hamilton qui a racheté Büren la même année[27] et qui de ce fait a mis la main sur des calibres automatiques aussi performants.

Pour Universal, l'intérêt de rejoindre Bulova est multiple[28] : conservation du personnel et de l'outil industriel, renforcement des services de recherche dans le domaine électronique et plus de moyens pour la création et le marketing. Il y a peut-être aussi un intérêt financier : selon certains auteurs, le prix de rachat par Bulova est estimé à 1,5 millions de francs, alors que Chronos Holding n'a proposé que 450 000 francs pour le rachat de Cyma, entreprise de taille équivalente[29].

Publicité de 1967

1966 est aussi l'année du lancement du calibre automatique Golden Shadow (UG 66), à micro-rotor, encore plus mince que le précédent avec 2,5 mm de hauteur.

Montre automatique Universal White Shadow

Calibre UG 67

1.2 De Bulova à Stelux

Le rachat par Bulova va permettre à Universal d'utiliser les calibres à diapason Accutron, que Bulova fabriquait d'ailleurs en Suisse, à Neuchâtel. Ce sera le lancement en 1968 des gammes Unisonic comprenant des montres hommes, dames et même, en 1969, un modèle de plongée, Unisonic Sub.

Publicité de 1970

En 1969, l'usine de Carouge est agrandie pour répondre au succès des montres Unisonic[30].

En 1970, Universal lance ses premières montres à quartz « Uniquartz » grâce à la mise à disposition du calibre Beta 21 développé par le Centre Électronique Horloger. Un changement important intervient à la tête de la société : Diether Kübel-Wilsdorf est nommé directeur général. Raoul Perret quitte le conseil d'administration[31] de la société l'année d'après, l'entreprise perdant sa figure la plus emblématique.

Publicité de 1970

En 1972, Universal reçoit une commande exceptionnelle de 50 000 montres pour les chemins de fer italiens[32].

En 1973, Universal inaugure un nouveau bâtiment complétant l'usine de Carouge[33]. Raoul Perret décède la même année.

La gamme Golden Shadow concerne désormais les montres en or équipées du calibre automatique UG 66, les montres en acier prenant le nom White Shadow.

Publicité de 1975

En 1974, Universal va utiliser le calibre hybride quartz/diapason de Bulova, mais présente en 1975 le calibre à quartz le plat du monde (UG 74, 3,45 mm de hauteur)[34]. C'est un calibre modulaire : le quartz est fourni par la SSIH (Omega), le module électronique comporte des composants RCA, le micromoteur est fourni par la Socrem (société de Recherches en Matière de Micromoteurs Électroniques à Besançon, filiale de Portescap) et la partie mécanique est propre à Universal, qui assure également l'assemblage.

Calibre Universal Shadow Quartz

Roger Lebet, directeur technique d'Universal, est nommé président de la Société Suisse de Chronométrie.

En 1976, Stelux, société de Hong Kong spécialisée dans des domaines variés comme les montres, les bracelets ou les composants électroniques, prend une participation de 27% dans Bulova en rachetant les actions qu'avaient Gulf and Western Industries[35].

En 1977, Sol Flick, vice-président de Bulova, devient président d'Universal et René Perret quitte l'entreprise. C'est la fin de l'aventure pour la famille des créateurs.

En 1978, Bulova est en difficulté et doit vendre Universal. Diether Kübel-Wilsdorf rachète alors l'entreprise[36] avec l'appui financier de Muraki Trading, concessionnaire Universal au Japon, et de Holzer Watch, concessionnaire Universal aux USA.

En 1979 Universal lance un nouveau calibre quartz maison, UG 43, extra-plat (2,30 mm), et présente une gamme de montres « habillées », équipées de mouvements extra-plats. Mais le succès n'est pas au rendez-vous. Les difficultés s'accumulent, en 1982 Universal cesse la production de ses mouvements et les bâtiments de Carouge sont vendus[37].

Publicité de 1981

En 1983, Universal est en sursis concordataire. Diether Kübel-Wilsdorf quitte l'entreprise. Les machines sont vendues, Universal n'est plus une manufacture. L'entreprise va alors vivre une période troublée : elle est relancée par la création de la société Montres Universal SA, avec pour président Jean-Claude Maibach, mais en 1985 Jean-Claude Maibach quitte l'entreprise et est remplacé par Parvis Hassan-Zadeh qui lance une montre « islamique » développée en collaboration avec Spacetronic SA, sonnant les heures des prières islamiques. C'est une montre à quartz en or vendue au prix astronomique de 42 000 francs[38].

En 1986 le groupe Stelux est de retour, rachète l'entreprise et nomme un nouveau président, Lennart Ödman. Plusieurs tentatives de relance d'Universal vont alors se succéder avec de nombreux changements à la tête de l'entreprise : nouveaux modèles Polerouter en 1987 avec un design totalement différent des modèles originaux, collections Altesse et 66 en 1988 avec des montres automatiques équipées de calibres à micro-rotors encore en stock, et déménagement à Thônex en 1989.

Montres des années 1990 avec calibre microtor

En 1991, alors que l'entreprise est dirigée par Charles Dom et Fred Santschi, Universal relance une gamme de chronographes Compax et de montres rectangulaires dans un esprit néo-vintage, et des montres simples sur base ETA.

Montre Golden Janus, 1994

En 1994, pour le centenaire d'Universal, Vincent Calabrese créé la montre Golden Janus qui comprend une boîte en deux parties, la première en platine étant dotée d'une charnière permettant de retourner la deuxième partie et d'exposer l'une des deux faces de la montre[39]. La première face indique heure et minute, l'autre indique l'heure d'un deuxième fuseau horaire avec heure sautante, la date et une indication jour/nuit.

En 1995, Universal présente le chronographe Golden Master Tech et l'année d'après les modèles Golden Complitech et Golden Compax.

Golden Classic, 1996

Golden Tech Dual Time, 1997

En 1997, alors que William Devine est directeur, Universal lance une montre avec deuxième fuseau horaire, la Golden Tech Dual Time, des chronographes au nom du pilote automobile Ayrton Senna avec calibres mécaniques et quartz, et une remarquable montre avec tourbillon dû à l'horloger Antoine Preziuso.

Universal Tourbillon, 1997

En 2001, Montres Universal SA devient Universal Genève SA[40]. Lancement des chronographes quartz Compax VQ et Compax Cirrus.

En 2006, lancement de l'Okeanos Aero-Compax, base Lémania, et présentation d'une montre équipée du nouveau calibre automatique à micro-rotor, Microtor UG 100[41] (édition limitée à 100 exemplaires), suivi par le calibre UG 101. En 2008, ce calibre sera utilisé pour un modèle avec boîte cabriolet. À partir de cette date la marque Universal sera mises en sommeil.

Calibre UG 100, 2006

Calibre UG 101, 2007

En 2023, Universal Genève est rachetée à Stelux par le groupe Partners, propriétaire de Breitling.

 

À suivre : les chronographes Universal, la Polerouter, Universal « couturier de la montre », etc…

 

Notes : 

Concernant Time To Tell : Time To Tell dispose de l'une des plus grandes bases de données privées numérisées sur l'histoire de l'horlogerie suisse avec plus de 2,3 To de données sur plus de 1000 fabricants de montres suisses. Cette base a été construite sur une période d'une trentaine d'années et continue à être alimentée d'environ 50 à 100 Go de données chaque année. Cette base de données est constituée de documents anciens, en majorité des revues professionnelles suisses, allant de la fin du 19e siècle à la fin du 20e siècle. La plupart de ces documents ne sont pas disponibles sur l'Internet. Les articles historiques publiés sur le site time2tell.com citent toujours les sources utilisées.

Time To Tell est une société privée, indépendante de tout fabricant d'horlogerie.

Concernant Universal Genève : La plupart des informations en ligne sur Universal n'ont pas de sources crédibles. Ainsi, de fausses informations sont répétées de site en site. C'est le cas par exemple des dates de sortie des différents modèles de chronographe Universal ou de l'origine de certaines montres comme l'Autorem. Cet article sur Universal a nécessité plusieurs mois de travail et s'est basé uniquement sur des sources historiques fiables. Toutes les sources utilisées sont citées en référence. Mais ceci n'empêche pas les erreurs ou omissions. Tout commentaire est bienvenu, et les lecteurs qui le souhaitent peuvent nous contacter sur timetotell@orange.fr

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[1] Un bel exemple est donné par l'article au sujet d'Universal sur Wikipédia : https://en.wikipedia.org/wiki/Universal_Gen%C3%A8ve, qui accumule les erreurs historiques

[2] Feuille Officielle Suisse du Commerce (FOSC) 1894

[3] Revue Internationale d'Horlogerie, 1947, 8, p. 25-27

[4] L'entreprise était enregistrée comme négociant et fabricant

[5] Brevet CH 8 014

[6] Brevet CH 12 402

[7] FOSC 1897

[8] FOSC 1906

[9] Revue Internationale d'Horlogerie, 1915, 1, p. 37

[10] Interview de Raoul Perret, in Journal Suisse d'Horlogerie, 1961, 4, p. 421 et suivantes

[11] Journal Suisse d'Horlogerie, 1945, 11-12, p. 879

[12] FOSC 1919

[13] FOSC 1934

[14] Journal Suisse d'Horlogerie, 1940, 1 p. 38-39

[15] Journal Suisse d'Horlogerie, 1941, 1, p. 15 et suivantes

[16] FOSC 1942

[17] FOSC 1942

[18] On peut trouver des montres automatiques Universal datant du début des années 1930. Il s'agit du système Autorem, évolution du système EMSA d'Eugène Meylan, d'abord utilisé par Glycine.

[19] Journal Suisse d'Horlogerie, 1949, 11-12, p. 393 et suivantes

[20] Journal Suisse d'Horlogerie, 1956, 5-6, p. 252 et suivantes

[21] Hans Kocher, Une vie marquée par des hommes et des montres, édité par l'auteur, 1998, p. 31 et suivantes

[22] Journal Suisse d'Horlogerie, 1959, 1, p. 63 et suivantes

[23] Revue Internationale d'Horlogerie, 1960, 4, p. 19

[24] La Suisse Horlogère, édition Hebdomadaire, 1963, 36, p. 824

[25] Journal Suisse d'Horlogerie, 1966, 4, p. 471

[26] La Suisse Horlogère, édition hebdomadaire, 1966, 33, p. 976

[27] L'Impartial, 1966, 9 février, p. 19

[28] La France Horlogère, 1966, 254, p. 81

[29] La Suisse Horlogère, édition hebdomadaire, 1967, p. 1625

[30] Journal Suisse d'Horlogerie, 1969, 1, p. 130

[31] FOSC 1971

[32] La Suisse Horlogère, édition hebdomadaire, 1972, 7, p. 188

[33] Journal Suisse d'Horlogerie, 1973, 6, p. 669

[34] La France Horlogère, 1975, 358, p. 123-124

[35] Bulletin de la Fédération Horlogère, 1976, 11, p. 20

[36] L'Impartial, 13 janvier 1978, p. 1

[37] Bulletin de la Fédération Horlogère, 1982, 19, p. 20

[38] L'Impartial, 10 avril 1985, p. 7

[39] Vincent Calabrese, Le temps d'une vie, Slatkine, 2016, p. 61

[40] FOSC 2001

[41] Il semble que ce calibre ait été développé en collaboration avec Les Artisans Horlogers, bureau d'étude créé en 2004 par Manuel Spöde et Laurent Besse.